Je continue le récit de mes pérégrinations à l’An, avant-dernier épisode avant les congés que j’attends avec impatience en vérité.

Ma vie de député

Ça y est je crois que je suis à peu près au point et que je vois le bout de la tonne d’administratif à réaliser quand on devient député.e (un peu de compassion pour ceux qui ont déclaré une phobie administrative, même si c’était sans doute pour d’autres raisons ). Il faut savoir par exemple, que la.le député.e a un régime de sécurité sociale différent (les fameux régimes spéciaux) et une complémentaire santé.Beaucoup de choses changent donc.

Dans le registre de ces démarches, je n’ai pas encore totalement arrêté mon choix quant à mon actuelle activité professionnelle. Je fais de la formation et du conseil en tant qu’entrepreneur salarié d’une coopérative (dont je suis également sociétaire). J’ai interrogé le déontologue de l’An pour identifier d’éventuelles incompatibilités. Si bien entendu, je vais cruellement manquer de temps, le fait de garder un pied dans une activité professionnelle, même minime, permet de « rester au contact » de la réalité, au moins celle dans laquelle, on agit professionnellement. Cela ne serait donc qu’occasionnel. J’interviens beaucoup sur les questions de démocratie, d’organisation sous l’angle de la démocratie et il me plairait néanmoins de pouvoir le faire de temps à autre. Un choix à faire donc.

Autre dimension de la vie d’un.e député.e, c’est la gestion financière. Nous gérons plusieurs enveloppes ce qui suppose un peu d’anticipation et des choix.
Il y a une enveloppe appelée AFM (Avance de frais de mandat) qui permet de financer toutes les dépenses relatives à l’exécution du mandant (Permanence, frais de représentation, gerbes pour les cérémonies, déplacements, abonnement presse, prestations de service, com…). (5373 € par mois)

Nous disposons aussi d’une enveloppe Dotation Matérielles des Député.e.s pour l’année pour les frais de bureautique, téléphonie, informatique, envoie courrier, (18950 € par an). Enfin, le.la député.e dispose d’une enveloppe collaborateurs d’un montant de 10581 € pour financer les postes de collaborateurs. trices (pour payer le salaire brut soit net +20% en moyenne). Cette enveloppe permet le recrutement de 3 collaborateurs.trices à plein temps. J’ai fait le choix de garder une marge pour pouvoir augmenter les salaires ou verser des primes, accueillir des stagiaires ou CDD ou pour renforcer l’équipe en fin de mandat. Sachez que si je dépasse cette enveloppe, je peux prendre sur l’enveloppe DMD puis sur l’AFM, sous réserve que je ne dépense pas tout. Au bout du bout, je peux prendre aussi sur mon indemnité d’élu.

Je n’ai pas encore totalement établi les budgets de chacune de ces enveloppes mais je tiendrai à jour, sur mon prochain site internet, un état de l’usage de ces enveloppes que j’effectuerai.

Loi pouvoir d’achat, un débat musclé mais éclairant

Il faut le dire cette loi suscite un désaccord de fond sur de nombreux aspects et les approches de la majorité et celle des groupes de la Nupes sont difficilement conciliables.
Voici quelques exemples :

🔹L’article 1 prévoit le triplement du plafond de la prime Macron (versée au bon vouloir des entreprises, moyenne 500 € loin du plafond initial de 2000 € et touchée seulement par 4,5 millions de salariés sur 25 millions. La Nupes défendait l’augmentation des salaires, à commencer par le SMIC. J’ai reçu quelques mails critiques sur cette question, expliquant le risque pour les PME-PMI. Outre qu’il existe déjà des dispositifs de prime, cette augmentation de salaire est la seule qui apporte une réponse structurelle et non conjoncturelle. Le gouvernement fait comme si l’inflation allait s’arrêter dans un an mais rien ne le laisse entrevoir, au contraire. Par ailleurs, nous défendions la taxation des superprofits pour financer cette augmentation du SMIC pour les entreprises qui en avaient le besoin. Enfin, précisons que cette prime est exonérée de cotisations, ce qui représente un manque à gagner supplémentaire pour les finances publiques et donc possiblement pour les services publics, impactant comme toujours les plus vulnérables.
🔹Article 2 : baisse des cotisation sociales pour un gain de pouvoir d’achat de 550 €/an. Là encore le débat porte sur le choix de réduire les recettes de l’Etat. Mais, il est utile que les indépendants puissent voir leur pouvoir d’achat augmenter (un peu)..
🔹Article 3 : faciliter les mécanismes d’intéressement non obligatoires en permettant une décision unilatérale de l’employeur dans les entreprises de -50 salariés. La durée de ces accords est également allongée. Là ici, c’est un choix entendable mais qui confirme la volonté de ne pas augmenter les salaires et de privilégier les primes de toutes natures.
🔹Article 5 : revalorisation des prestations sociales par anticipation. En fait ici, c’est juste une anticipation de la revalorisation et non une augmentation de pouvoir d’achat en tant que telle. Elle arrive plus vite mais rien ne dit que lors de la prochaine échéance de revalorisation légale, l’effet inflation ne se poursuive pas.
🔹Article 6 : c’est un article relatif au maintien de l’IRL (indice de référence des loyers) en deçà d’un taux d’augmentation de 3,5%. Nous demandions l’encadrement des loyers étendue, la garantie universelle et un taux IRL au max de 1%. En clair, il ne s’agit pas ici d’un gain de pouvoir d’achat mais d’une plus faible perte de pouvoir d’achat ! Rappelons que les charges locatives explosent et que les salaires stagnent. Nous allons voir émerger de nouvelles couches de pauvreté dans nos territoires, avec un effet ciseaux insupportable. Le débat portait sur les petits propriétaires qui ont aussi besoin de cette augmentation. Mais en gros, une bonne part du parc est détenue par des multipropriétaire et aucun mécanisme de distinction entre ces types de propriétaires n’a été proposé. Nous sommes loin de la justice sociale et pas à la hauteur de la situation.
🔹Article 7 à 9 : concerne la protection des consommateurs : faciliter les résiliations de contrats conclus par voie électronique, auxquelles nous avons fait ajouter l’ensemble des contrats conclus à distance et fait sauter le reste à charge de 25% pour frais de résiliation !
🔹Article 10 à 19 : souveraineté énergétique : là pour l’écologiste que je suis, c’est le pompon. Il s’agit face au risque d’approvisionnement dû à la guerre en Ukraine mais aussi à l’arrêt de près de la moitié des réacteurs nucléaires, de proposer l’ouverture d’un terminal méthanier pour accueillir du gaz de schiste américain (on remplace une dépendance par une autre) dont l’extraction est interdite chez nous, on prévoit la réouverture possible d’une centrale à charbon.
❌C’est un retour en arrière, nous sommes loin de la planification écologique qui est ici totalement inexistante. Le manque d’anticipation conduit à des solutions qui vont nous impacter alors que nous accusons un retard sur le rythme nécessaire pour tenir nos engagements. Pire, on s’autorise à réduire les procédures environnementales pour aller vite…Une porte ouverte qui risque de justifier d’autres exceptions…
🔹Article 20 : : cet article concerne les transports de marchandises et remplace la notion de carburant par celle d’énergie de propulsion. C’est ici que Julien Bayou a fait passer un amendement sur l’usage de l’huile de friture (pas toutes les huiles). Loin aussi de répondre là encore aux enjeux.

Mes positions :
J’ai défendu des amendements en commission Affaires économiques saisie sur le fond sur les articles 7 à 19 puis en séance publique visant à:
▪️A Interdire le démarchage téléphonique et à défaut, à permettre les mêmes conditions de résiliation que pour les contrats souscrits en ligne. Ce deuxième aspect a été adopté par un amendement précédent le mien et faisant « tomber » le mien puisqu’y répondant,
▪️A supprimer les articles 13, 14 et 15 relatifs au terminal méthanier et à la réouverture possible d’une centrale à charbon. Ces articles ont été votés et nos amendements rejetés
▪️A intégrer une volet sobriété et pouvoir d’achat concernant la rénovation thermique des logements notamment. Ils ont été considérés comme irrecevables tant sur cette loi que pour le Projet de loi de finances rectificative.
▪️A accélérer le raccordement de projets d’Energie Renouvelable ayant passés toutes les étapes et ne demandant qu’à être raccordés. Déclarés irrecevable alors que cela permettait un approvisionnement à hauteur de 5 GWh, ce qui aurait été utile dans cette séquence critique à venir.

➡️Notons que je n’étais pas là pour la fin de ces débats car j’avais programmé une réunion en circonscription le jeudi soir et un séminaire de travail le vendredi. J’ai arbitré en faveur d’une présence en circonscription cette fin de semaine. Je suis partagé sur ce choix, nécessaire pour maintenir et renforcer le lien avec les habitant.es et acteurs de mon territoire mais au détriment des débats et votes des amendements. La difficulté est que le calendrier bouge tous les jours en fonction de l’état d’avancement. Ce week-end le projet de loi de finances rectificatif a été soumis à l’assemblée et les travaux se sont arrêtés le samedi à minuit. Il reprenne ce jour à 17h et jusqu’à tard ans la nuit, j’y serais. Il faut savoir que la règle de base est une fin des travaux à minuit mais qu’avec accord des présidents de groupe, ils peuvent se prolonger.
La loi pour la protection du pouvoir d’achat a été votée à 6h30 du matin !!! 🤯 C’est en général ce qui se passe lorsque l’on s’approche de la fin de l’examen d’un texte.

🔴 Disons également que les positions au sein de la Nupes étaient concordantes sur le sens global du texte, le refus d’augmenter les salaires et le risque majeur que ni la protection ni l’amélioration du pouvoir d’chat ne soit véritablement au rdv. Nous avions des divergences (elles ne sont pas une surprise, elles étaient actées dans notre programme commun) sur la vision de la souveraineté où sur l’appréciation de la situation (il faut le dire si mal documentée par ailleurs, ni mesure du degré d’urgence, ni justification des choix faits). Cela a conduit à des votes différenciés.

✅J’ai participé à la rédaction d’un communiqué de presse commun aux 4 groupes, trouvant les formules adéquates pour exprimer nos convergences et respecter nos différentes approches. La Nupes continue de fonctionner et j’ai le plaisir de participer aux travaux de coordination tous les mardis matin. C’est un temps pour progresser ensemble, dire nos accords mais aussi assumer nos différences.

🔴 Notre ligne est d’être une opposition assumée au regard des visions très différentes que portent la majorité « minoritaire » tout en essayant de faire avancer des sujets pour nos concitoyens et de tenter à chaque fois que cela est possible de défendre notre programme.

❌Pour finir sur ce projet de loi, nous ne pouvions voter pour mais il n’était pas davantage possible de s’abstenir en se disant « ce qui est pris est pris », tant cette loi nous apparaît comme profondément décalée avec ce qui est nécessaire, sur le pouvoir d’achat comme sur les enjeux d’énergie. Et même temps, l’intégration de la déconjugalisation de l’AAH (voir comme mettre un lien), moment important après 6 rejets dans l3 précédent mandat par la majorité, ne suffisait à inverser notre appréciation de cette loi. Nous avons bien sûr voté pour la déconjugalisation de l’AAH. Il m’a semblé un peu indécent que la majorité le présente comme une forme de « co-construction » et presque comme leur victoire, tant ils ont mis du temps à admettre la nécessité de lever cette injustice, dénoncée par tant et tant d’associations.

🔴 PLFR (Projet de loi de finances rectificative)
Précisons qu’un certain nombre de mesures de pouvoir d’achat relevait de cette loi comme par exemple l’automatisation du versement des minimas sociaux, la suppression de la redevance audiovisuelle, l’augmentation du point d’indice des fonctionnaires ou encore à l’initiative de la Nupes, la proposition d’une taxation des superprofits des grandes entreprises.
Je reviendrais sur ces aspects mais je voudrais simplement souligner les grands risques que comprend la suppression de la redevance audiovisuelle quant à l’indépendance des médias, déjà mise à mal. Je vous invite à lire le rapport Julia Cagé ses propositions alternatives, notamment celle d’une imposition progressive

En circo cette semaine

Se tenait jeudi, la première réunion depuis les élections et beaucoup de monde présent (près de 70 personnes). Ce fut un moment très agréable et très utile aussi.

🙋🏻‍♂️❓Le choix collectif a été fait de privilégier ce que j’appellerai les QAD (Questions au Député), [comme les QAG (NDLR : Questions au Gouvernement, séquence chaque mardi après-midi, permettant aux député.es de soumettre des questions au gouvernement soit d’ordre général soit en lien avec les territoires. Notre groupe dispose chaque mardi d’un droit à deux questions. Chaque question dure 2 mn et la réponse également].

✅Elles furent nombreuses et très pertinentes, quel plaisir de pouvoir expliquer la réalité de l’exercice, mes perceptions des enjeux politiques et de l’ambiance à l’An.
Du coup, nous avions programmé 3 groupes de travail qui ont été créés et qui seront lancés d’ici la rentrée :
1️⃣ L’un concerne la mise en place d’une tournée citoyenne à la rencontre des quartiers de Tours entre les mois de septembre et octobre
2️⃣ le second la création d’un parlement de circonscription déjà imaginé et testé pendant la campagne,
3️⃣ le 3ème relatif à un projet d’enquête populaire sur les services publics en lien avec l’association Convergence Services Publics en (Indre et Loire
Si intéressé.e, vous pouvez prendre contact avec Zélie Geneix
Et sinon, nous avons répondu aux sollicitations d’habitant.es sur des situations individuelles et allons organiser des permanences fixes à compter de la rentrée.

📖🖌Pour finir, j’ai profité de ce week-end pour rédiger des textes de référence pour le parlement de circonscription et à travailler sur les propositions que nous ferions pour le parlement Nupes au niveau national.
🚂 De retour à Paris ce lundi, nos travaux reprennent ce jour.

Merci de votre lecture fidèle et suite au prochain numéro 😊